Sélectionné par le Prix Dauphine pour l’Art Contemporain, le binôme formé par Mathieu Merlet-Briand et la curatrice Anaïs Lerendu questionne notre rapport contemporain au digital.

« Notre relation sensible au numérique est hyper aseptisée. Tout se passe au travers d’interfaces que sont notamment l’écran et le clavier. Il y a très peu de sensibilité. Nous dépendons du digital, nous le pratiquons au quotidien, mais nous le connaissons finalement que très peu. Je cherche à générer des prises de recul, à faire prendre conscience de sa troublante matérialité ».

Véritable sculpteur 2.0., Mathieu Merlet-Briand utilise un vocabulaire plastique peu commun. Programmations, codages et algorithmes lui permettent d’opérer un recyclage de la matière virtuelle. L’artiste puise ses matériaux dans le déferlement infini d’images délivré par Google à la saisie des termes « marbres », « calcaire », « granit » et autres minéraux. Après avoir superposé ces photographies, telles des milliers de calques, un logiciel révèle ensuite certains fragments de chacune d’entre elles. Cette accumulation vertigineuse se confond alors en une texture pixellisée intrinsèquement issue du digital, donnant l’illusion de sédiments et stratifications correspondant aux statistiques de recherches qu’enregistre Google depuis son existence : « Quand on coupe un arbre, on observe des strates, qui sont des données temporelles. J’ai essayé d’interpréter cette dimension géologique dans ma recherche» .

Mathieu Merlet Briand, Monochromes Google

Mathieu Merlet Briand, Monochromes Google

Il explore ainsi la matérialité du numérique et saisit des analogies à la nature et à l’organique. Son installation « non-site » dessine in fine une sorte de temple en ruine, un site archéologique post-digital. Fragments d’infini contrecollés sur plaques en métal, ces débris de colonnes et blocs de pierres, baptisés « Google basalt », « Google marble », ou « Google limestone », questionnent la fragilité des données numériques et leur dimension illusoire.