Une exposition dans un train fantôme ? une idée étonnante et un peu farfelue portée par l’artiste Thibault Brunet et la curatrice Joséphine Dupuy-Chavanat. Fabriqué au début des années 1980, le Creep Train est un manège forain à l’allure bien appuyée, que avez pu notamment croiser à la célèbre foire du trône à Paris lors d’un rancard adolescent.

Étrange projet donc, où l’art contemporain se confronte au monde forain, à un territoire effrayant aux bruits et odeurs saturés d’épouvante. Un projet original et hors norme qui ne peut que forcément attiser notre curiosité.


Alors, c’est quoi cette histoire de train fantôme ?

Thibault Brunet : Creep Train, le train fantôme est un manège de fête foraine que nous allons transformer en espace d’exposition d’art contemporain. Cette idée a germé lors d’une résidence à NY il y a deux ans pendant la fête d’halloween. Je me promenais dans les rues, fasciné par l’engagement de tous et j’ai assisté à une véritable transformation de la ville en territoire horrifique, un déploiement baroque de citrouilles, toiles d’araignées, squelettes, sorcières, que je retrouvais jusque dans les galeries, transformées en maison hantées.

“L’art jouait le jeu” en quelque sorte et cette idée m’a beaucoup plu. C’est tout naturellement plongé dans cet univers que j’ai repensé au train fantôme et commencé à élaborer ce drôle de projet. L’idée de mélanger une attraction foraine et une exposition d’art contemporain s’est développée. J’ai eu envie de déplacer l’exposition d’art contemporain, sortir des habitudes et créer une exposition, bruyante, dichotomique, qui a l’odeur du papier gras, de la barbe à papa et des chichis.

Ce projet était au début un fantasme irréalisable, il est devenu plus concret à force d’en parler autour de moi. C’est quand Joséphine est arrivée dans l’aventure que nous avons pu avancer pleinement dans ce projet, et nous commençons maintenant à y croire beaucoup plus sérieusement.

« Creep Train »…, c’est censé faire peur ?

Joséphine Dupuy-Chavanat : Les artistes qui viendront investir les espaces du train fantôme auront comme fil rouge la thématique de l’horreur et de l’épouvante. Il est essentiel que nous restions attachés à la dimension “fête foraine” de l’attraction, et que les artistes créent des installations immersives dans lesquelles les visiteurs seront épouvantés. Toutefois, nous souhaitons que des enfants viennent visiter le train, et il n’est pas question de les traumatiser !

“Creep Train”, c’est le nom qu’ont donné Eugénie et Cliff, les anciens propriétaires, au train fantôme. Il a été fabriqué au début des années 1980. Il a pris diverses allures jusqu’à devenir ce qu’il est aujourd’hui.

Nous allons bien sûr garder sa façade et son aspect originel. C’est l’intérieur qui sera en revanche totalement transformé par les interventions artistiques.

Creep Train le train Fantôme

Creep Train le train Fantôme

Et concrètement comment ça se passe pour les visiteurs, ils verront quoi ?

TB : Le manège est divisé en 4 espaces principaux que les artistes se partageront. Le petit train va traverser les pièces des artistes – installation, sculpture, vidéo – en créant un rythme dans la visite du manège. Nous voulons emporter le spectateur dans une aventure incroyable en mêlant l’art contemporain et la culture de l’épouvante.

Toutes les dix minutes, une nouvelle visite du train fantôme sera lancée. Les visiteurs vont monter dans leurs wagons, et seize personnes par seize personnes, le petit train traversera l’attraction, dans la saturation de l’espace et des sens.

C’est un peu dingue comme projet, comment vous avez trouvé la manège d’origine ?

JDC : Nous ne savions pas du tout par où commencer ! Mais nous avons tout de suite regardé sur internet, et nous sommes tombés sur tout un tas de sites internet de forains, qui vendaient aussi bien des auto-tamponneuses que des mares aux canards, en passant par des semi-remorques et des pièces détachées de caravanes. Nous avons appelé un certain nombre de forains, certains étaient très suspicieux, d’autres nous ont raccroché au nez… et nous avons finalement pris contact avec un jeune couple de forains qui souhaitaient vendre le Creep Train pour renouveler leur panel d’attractions. Les échanges ont tout de suite été très bons, nous avons discuté ensemble du projet et nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, au Barcarès dans le sud de la France où le Creep Train est installé pendant les fêtes de Noël et durant l’été, et à la Foire du Trône à Paris.

Creep Train le train Fantôme

Creep Train le train Fantôme

Du coup, tout ça doit demander une sacrée logistique non ? entre le stockage, le transport, les assurances…

TB : Oui en effet… C’est un projet complet et nous devons penser à tout. Nous sommes dans le hors normes et le hors format. Le train démonté par exemple tient dans deux semi-remorques. Le montage du train en lui même se fait en une semaine !

Nous devons également être au courant des normes d’accueil d’un manège de fête foraine et d’un espace d’exposition… Mais nous avons la chance d’être une belle équipe, nous sommes en ce moment 6 personnes à travailler sur ce projet.

Et il vous manque quoi aujourd’hui pour concrétiser définitivement le projet ?

JDC : Tout d’abord, nous sommes en train de confirmer la liste des artistes. Sans eux, pas de projet !

Par ailleurs, nous sommes à la recherche de sponsors et mécènes, car il s’agit d’un projet ambitieux qui a besoin de moyens conséquents. Il nous faut en effet acheter le train, qui s’accompagnent de frais de notaires importants, le retaper, produire l’exposition, etc. Mais nous sommes en bonne voie pour trouver de beaux mécènes.

Creep Train, photo Thibault Brunet

Creep Train, photo Thibault Brunet

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