Une visite de l’atelier du peintre Julien des Monstiers par Ana Bordenave et le photographe Salim Santa Lucia. Initialement paru dans la revue Lechassis #3 en 2017.
Sur une imposante toile, des griffures orange vif apparaissent en creux et en épaisseur derrière une couche de couleur pastel verte et rose. Le peintre nous explique : l’œuvre s’inspire des Nymphéas de Monet. Dématérialisée par la violence de l’orange, la référence s’efface. À sa gauche, la surface d’une seconde toile a été arrachée. Les strates de couleurs accumulées se révèlent, se contredisent et fusionnent. Entre les toiles, et dans un léger désordre, quelques livres sur l’art s’entassent, un matelas se transforme en sculpture, les outils et la peinture couvrent le sol et le plan de travail.
Julien des Monstiers occupe la moitié d’un atelier partagé. Pour y accéder, on traverse une large cour où, par une matinée ensoleillée, s’entendent les oiseaux et le lointain son du périphérique. À l’intérieur, une lumière zénithale et une forte odeur de peinture et de solvant habitent l’espace. Aux murs, d’immenses toiles en côtoient de minuscules, les formes abstraites s’opposent aux motifs figuratifs, le matiérisme de certaines œuvres rencontre les surfaces lisses des autres. L’artiste s’inscrit dans la grande histoire de la peinture en multipliant les références.
Travaillant à la fois l’épaisseur et la surface, les toiles de Julien des Monstiers jouent sur les accumulations et les soustractions de couches comme autant d’histoires superposées. Les peaux retirées des peintures sèchent sur le sol de l’atelier.
Ana Bordenave est doctorante arts et études de genre à l’Université Paris VIII, et critique d’art à l’occasion, elle soutient la création émergente sous toutes ses formes.
Salim Santa Lucia photographie l’art et les artistes d’aujourd’hui : il réalise des reportages d’ateliers, des portraits mais aussi des prises de vues de performances et d’expositions.